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Pénalisons les clients et les proxènetes décriminalisons les prostituées

Pour diffusion immédiate
CNW : code 01
GQM : 00660

Québec, le 11 juin 2013  –  À la veille de l’ouverture en Cour suprême du Canada des audiences entourant la cause Bedford, dont l’issue pourrait avoir comme résultat de décriminaliser totalement la prostitution, le Conseil du statut de la femme tient à rappeler que la prostitution est une pratique qui doit être freinée. Il est essentiel de reconnaître que la prostitution est, dans la plupart des cas, une forme d’exploitation qui porte atteinte à la dignité des femmes et au droit à l’égalité des sexes.

Quelques intervenants québécois seront entendus par la Cour suprême, dont le Procureur général du Québec. Dans le mémoire déposé par le Procureur, il est indiqué que les dispositions du Code criminel relatives à la prostitution doivent être déclarées constitutionnelles par la Cour suprême, car elles protègent les personnes prostituées et réduisent les maux sociaux causés par la prostitution. En d’autres mots, le Procureur général est d’avis que les prostituées doivent continuer à être criminalisées, car elles seraient ainsi mieux protégées, ce à quoi s’oppose vigoureusement le Conseil du statut de la femme. Cette criminalisation porte atteinte aux prostituées, qui sont souvent exploitées par des proxénètes, et contribue à les maintenir dans ce milieu malsain, comme le Conseil l’a documenté dans son avis La prostitution : il est temps d’agir. Le Conseil continuera de défendre haut et fort la vaste majorité des femmes pour qui la prostitution débute alors qu’elles sont mineures, souvent à la suite d’une enfance marquée par la violence.

Agir à deux niveaux

Dans son avis publié en mai 2012, le Conseil recommande de pénaliser uniquement les clients et les proxénètes, tout en décriminalisant les personnes prostituées. Il importe que socialement, tous comprennent que le corps des femmes n’est pas à vendre.

Le Conseil préconise l’adoption d’une loi à l’instar de celle appliquée en Suède pour décriminaliser les personnes victimes et criminaliser l’achat de services sexuels ainsi que le proxénétisme. Au plan social, le Conseil réclame des services spécialisés pour aider véritablement les personnes prostituées et les victimes de la traite qui le veulent, à quitter ce milieu.

N’oublions pas que c’est la demande de services de nature sexuelle qui encourage la prostitution et la traite humaine à des fins d’exploitation sexuelle. Le Conseil estime qu’il est temps de décriminaliser les personnes prostituées. Dans la grande majorité des cas (80 %), ces dernières ont commencé à l’âge de 14 et 15 ans. Selon les recherches, quatre prostituées sur cinq ont subi des violences physiques et psychologiques, notamment reliées à l’inceste, la pédophilie et le viol. Ici même, au Canada, leur taux de mortalité est 40 fois supérieur à la moyenne et plus de 60 % d’entre elles souffrent de stress post-traumatique. Devant de telles circonstances, il est illusoire de penser que l’entrée dans la prostitution résulte généralement d’un choix libre et éclairé. Il faut bien sûr reconnaître que certaines femmes peuvent tirer profit de ce commerce lucratif, mais il s’agit d’une minorité. Même l’avocat des trois requérantes à l’origine de la cause Bedford admet qu’il parle au nom de seulement 5 à 20 % des femmes prostituées.

« Contrairement à cette phrase qu’on nous répète sans cesse et qui favorise le statu quo, la prostitution n’est pas le plus vieux métier du monde. Comme société, plutôt que de se fermer les yeux et de se donner bonne conscience en parlant de choix libre et éclairé de femmes libérées, nous avons le devoir de tenter de minimiser cette forme d’exploitation », souligne la présidente du Conseil du statut de la femme, Mme Julie Miville-Dechêne. Rappel des faits La cause Bedford, portée devant les tribunaux par trois femmes issues de l’industrie du sexe, a d’abord été entendue à la Cour supérieure de l’Ontario en 2009. Le tribunal ontarien a invalidé les articles du Code criminel interdisant la tenue d’une maison de débauche, le fait de vivre de la prostitution d’autrui et la communication à des fins de sollicitation. Selon la Cour supérieure, ces trois articles contreviennent au droit à la liberté et à la sécurité des prostituées, droit reconnu dans la Charte canadienne des droits et libertés. En 2012, la Cour d’appel de l’Ontario a essentiellement confirmé ce jugement en statuant que deux des trois articles encadrant la pratique de la prostitution étaient inconstitutionnels.

La Cour suprême a accueilli la demande d’appel du Procureur général du Canada et de l’Ontario et les audiences s’ouvrent ce jeudi 13 juin. Si ce jugement est maintenu par le plus haut tribunal du pays, la prostitution pourrait être décriminalisée au Canada. Pour le Conseil du statut de la femme, cette décision entraînerait de lourdes conséquences, notamment celle de légitimer l’exploitation sexuelle de ces femmes par les proxénètes et les clients.

Durant les prochains mois, le Conseil du statut de la femme aura les yeux tournés vers la Cour suprême pour suivre les travaux entourant ce débat controversé.

Pour information

Marie-Andrée Lefebvre
Attachée de presse
Conseil du statut de la femme
marie-andree.lefebvre@csf.gouv.qc.ca
Cellulaire : 418 446-2203
Téléphone : 418 643-4326, poste 245

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