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Avortement : la sécurité et la santé de nos voisines sont menacées



Lettre ouverte de Mme Julie Miville-Dechênes, présidente du Conseil du statut de la femme.

Mon indignation est encore vive après avoir entendu mes collègues de l’Île-du-Prince-Édouard et du Nouveau-Brunswick expliquer de vive voix le manque d’accès à l’avortement dans leur province respective.

Le 23 septembre dernier, je me suis rendue à Charlottetown pour rencontrer les autres membres de la Coalition canadienne des conseils provinciaux et territoriaux du statut de la femme, qui représentent neuf des provinces et territoires canadiens. À cette occasion, nous avons entre autres abordé le sujet de l’avortement.

Depuis une vingtaine d’années, aucun médecin n’accepte de pratiquer des avortements à l’Île-du-Prince-Édouard. Dans une recherche terrain menée là-bas (Trials and Trails of Accessing Abortion in PEI : Reporting on the Impact of PEI’s Abortion Policies on Women, Dr. Colleen MacQuarrie et als. Université de l’Île-du-Prince-Édouard), le chemin pour accéder à des services est décrit comme « un labyrinthe constitué de nombreux chemins menant à des culs-de-sac, des barrières et des contretemps ». Des femmes enceintes sont à ce point désespérées qu’elles essaient de s’autoavorter en ingérant des produits chimiques ou en demandant à leur conjoint de leur donner des coups dans le ventre. Que des femmes doivent en venir là, en 2014, au Canada, est proprement scandaleux!

Le seul recours qui s’offre à elles est semé d’embuches : une femme souhaitant obtenir un avortement doit d’abord avoir une référence d’un médecin local ainsi qu’une échographie; elle doit ensuite se rendre, à ses frais, dans un hôpital d’Halifax (à quatre heures de route), pour obtenir un avortement, et ce, à condition qu’elle soit enceinte de moins de 15 semaines. On comprend le désespoir de jeunes femmes qui veulent cacher leur grossesse et qui n’ont pas les moyens de faire le trajet dans une autre province.

La situation n’est guère meilleure au Nouveau-Brunswick. Faute d’argent, la seule clinique privée d’avortement – la clinique Morgentaler – a fermé ses portes cet été. Cette clinique accueillait aussi des patientes de l’Île-du-Prince-Édouard. Pour avoir droit à un avortement dans un hôpital, les Néo-Brunswickoises doivent obtenir la « permission » de deux médecins, un généraliste et un spécialiste. Dans une province où il manque de médecins et où l’opposition à l’avortement est répandue, cette « permission » n’est pas simple à obtenir.

Ces conditions sont totalement inacceptables. Il y a 25 ans, la Cour suprême du Canada jugeait que les restrictions à l’avortement menaçaient la sécurité des femmes, et donc violaient leurs droits fondamentaux. C’est pour cette raison que l’avortement a été décriminalisé. Pourtant, ces deux provinces font apparemment fi de ce jugement. Que faire? La voie judiciaire semble longue et difficile : les poursuites entreprises contre le gouvernement du Nouveau-Brunswick ont été abandonnées, faute de financement.

Il faut donc de toute urgence une solution politique à cette situation intolérable pour les femmes de l’Île-Prince-Édouard et du Nouveau-Brunswick. Une bonne nouvelle dans le dossier : le premier ministre récemment élu à la tête du Nouveau-Brunswick, M. Brian Gallant, s’est engagé à agir rapidement pour éliminer les obstacles qui freinent l’accès à l’avortement. Encourageons-le à tenir son engagement, au nom de nos consœurs des Maritimes.

Le Conseil souhaite donc que le premier ministre québécois, M. Philippe Couillard, et la ministre responsable de la Condition féminine, Mme Stéphanie Vallée, fassent pression sur leurs vis-à-vis des Maritimes à ce sujet. C’est une question de santé et de sécurité pour nos concitoyennes canadiennes, et personne ne doit rester indifférent à leur sort.

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