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Congrès de l’Acfas

90e édition

Colloque « L’égalité entre les femmes et les hommes au Québec :
entre avancées et enjeux persistants »

Les 8 et 9 mai 2023, à l’occasion de son 50e anniversaire, le Conseil du statut de la femme a tenu le colloque « L’égalité entre les femmes et les hommes au Québec : entre avancées et enjeux persistants ».

Quelles avancées ont été réalisées au Québec en matière d’égalité entre les femmes et les hommes? Quels enjeux, persistants ou nouveaux, subsistent et méritent notre attention dans les prochaines années? Réunissant des chercheuses et des chercheurs de différents horizons disciplinaires, l’événement a permis de constater que tout est loin d’être gagné, et que les enjeux en matière d’égalité se complexifient.

Ces deux journées, riches en savoirs, étaient articulées autour de cinq grands axes : socialisation et représentation des femmes, pouvoir et prise de parole, famille et conciliation famille-travail, marché du travail, inégalités économiques et vulnérabilités des femmes. Une occasion, pour le Conseil, de mesurer le chemin parcouru depuis la publication de son avis fondateur Pour les Québécoises : égalité et indépendance, et de prendre acte, à la lumière des connaissances actuelles, des systèmes de discrimination qui perdurent et des inégalités croisées omniprésentes.

La majorité des présentations faites dans le cadre du colloque sont accessibles en format vidéo.

Voir la programmation détaillée.

Remerciements

L’équipe organisatrice du colloque tient à remercier les conférencières et conférenciers pour leur engagement.

Programmation

Lundi 8 mai 2023

Séance 1 – Socialisation et représentation des femmes

• 09 h 30 : La construction sociale des différences sexuelles : « Du côté des petites filles »
Conférencière : Francine Descarries (UQAM – Université du Québec à Montréal)

Conférencière : Francine Descarries (UQAM - Université du Québec à Montréal)

Résumée : Malgré les avancées significatives qui ont transformé la vie des femmes québécoises au cours des dernières décennies, comment expliquer la reproduction d’un « prêt-à-penser » du féminin et du masculin dont les effets « inégalitaires » persistants se répercutent sur leurs pratiques quotidiennes, comme sur l’ensemble de leur trajectoire de vie? On ne naît pas femme on le devient. C’est par cet aphorisme désormais célèbre que Simone de Beauvoir s’attaquait il y a près de soixante-quinze ans à toutes les prédications naturalistes voire sexistes qui, pendant des siècles, ont servi à justifier la division sociale des sexes et les inégalités qu’elle génère. C’est ce même aphorisme qui me vient à l’esprit lorsque j’entends des parents affirmer Et pourtant je les ai élevés pareil lorsqu’ils se surprennent à observer chez leur fille et leur garçon des attitudes et comportements différents. Une telle affirmation ramène à l’avant-scène l’ensemble des mécanismes de socialisation à travers lesquels filles et garçons construisent leur identité sexuée et apprennent les normes et les comportements qui leur permettent d’entrer en relation avec les autres.

Quels sont ces mécanismes sociaux et relationnels qui, à ce jour, empêchent de rompre définitivement avec des siècles d’intériorisation de codes sociaux d’un féminin et d’un masculin arbitrairement assignés? C’est de la complexité de ce processus de socialisation de genre et de ses multiples dimensions dont traite le présent exposé.

Séance 2 – Pouvoir et prise de parole

• 10 h 30 : Québécoises et représentation parlementaire : d’hier à aujourd’hui
Conférencière : Manon Tremblay (Université d’Ottawa)

La démocratie représentative repose sur la capacité, pour toute personne, d’élire et d’être élue. Au contraire des hommes pour qui ces attributs ont été considérés comme inhérents à leur humanité, les femmes ont le plus souvent dû mener des batailles épiques pour les exercer. C’est le cas au Québec.

L’objectif de cette communication est de brosser à grands traits un portrait de l’évolution de la participation des femmes à la politique législative au Québec. Je revisiterai d’abord quelques-uns des arguments mis de l’avant en soutien et en rejet au droit de vote des femmes à la lumière d’une idée : le suffrage des femmes évoquait un scénario terrifiant, celui d’une déstabilisation, voire d’une inversion des rôles de genre. Puis j’évaluerai, de manière critique, la représentation des femmes à l’Assemblée (législative) nationale du Québec de 1961 à 2023, notamment en réfléchissant aux motifs habituellement servis pour expliquer leur positionnement minoritaire sur l’échiquier législatif. Ma lecture portera une attention particulière aux femmes des minorités de sexe et de genre. En conclusion, j’esquisserai quelques réflexions sur les (in)capacités du régime politique québécois à représenter les femmes (a fortiori, les femmes dans toutes leurs diversités et leurs complexités) et l’importance d’envisager d’autres espaces de mobilisation démocratique.

• 10 h 55 : À chances égales? Perspectives intersectionnelles sur le traitement médiatique des femmes politiques et de la diversité
Conférencière : Chantal Maillé (Université Concordia)

Plusieurs facteurs ont contribué à enrichir le champ des études sur les femmes et la politique, au Québec et à l'international. Dans cette communication, il sera question d'analyse intersectionnelle, de la diversification des profils des femmes politiques et de la diffusion de nouvelles analyses sur les représentations médiatiques des femmes politiques et de la diversité.

Dans un projet de recherche portant sur les reproductions du genre et autres marqueurs identitaires dans les représentations médiatiques des femmes politiques pour les contextes québécois, canadien et américain, on a pu repérer un ensemble de manifestations de la médiation genrée, dont les messages négatifs des médias au sujet des femmes politiques et l'attention continuelle portée à leur corps.

D'autres facteurs s'ajoutent à la médiation genrée lorsqu'il s'agit de femmes politiques de la diversité; c'est ce qu'exprime la notion de médiation genrée +. Des auteures comme Erin Tolley utilisent la notion de "plafond de verre teinté" (stained glass ceiling) pour décrire la couverture médiatique des femmes racisées dans les campagnes électorales au Canada.

Des changements dans le traitement médiatique des femmes politiques et une attention particulière aux membres de la diversité sont nécessaires pour en arriver à une véritable égalité des chances.

• 11 h 20 : La prise de parole des femmes dans le cadre des audiences publiques du BAPE : Un regard historique
Conférencier(e)s : Odile Rochon (BAPE), Pierre Batellier (BAPE)

Notre recherche offre un portrait inédit de la prise de parole selon le genre basé sur des dizaines de milliers d’interventions orales au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) sur plus de quatre décennies. Les données montrent que les femmes ont longtemps été sous-représentées au micro des séances publiques du BAPE et qu’aujourd’hui, malgré des progrès significatifs, la proportion de femmes qui prennent la parole demeure loin d’une forme de parité.

Cette situation a soulevé un double questionnement : Pourquoi les femmes prennent-elles moins la parole ? De quels leviers dispose une organisation de participation publique pour faciliter cette prise de parole ? L’analyse de données qualitatives internes, d’une documentation issue de la littérature sur la prise de parole ainsi que des regards et expériences d’autres organisations a permis de faire ressortir cinq déterminants de la prise de parole des femmes :

1. La connaissance de l’organisation et de ses processus/activités
2. Les ressources des personnes participantes
3. Le climat social
4. Le sentiment de légitimité
5. Les mécanismes de prise de parole

Un ensemble de pratiques d’intérêt pour influencer ces déterminants et agir positivement sur la prise de parole des femmes ont ensuite été identifiés offrant un éventail de possibilités d’action qu’une organisation de participation publique peut, dans son contexte propre, considérer pour favoriser la prise de parole des femmes.

Séance 3 – Pouvoir et prise de parole (suite)

• 13 h 30 : Invaincues, même en désavantage numérique : Évolution de la place des femmes dans les sports au Québec
Conférencière : Guylaine Demers (Université Laval)

Le sport est un des derniers bastions de l’hégémonie masculine. Pour preuve, il est un des secteurs où les québécoises sont largement sous-représentées à la fois à titre de participantes et dans les postes d’entraîneures, d’officielles, de dirigeantes et d’administratrices. Cette présentation offrira l’occasion de faire un survol de l’évolution de la place que les filles et les femmes ont occupé en sport au fil du temps, et ce, autour de trois thèmes :

1) La recherche qui a mis en lumière la division sexuée dans la gouvernance des sports et dans l’encadrement sportif; 2) Les actions du gouvernement et des organisations œuvrant pour l’égalité des sexes : le sport au Québec étant financé par l’état, il sera question des actions entreprises à ce jour et celles qui doivent être déployées pour l’atteinte de l’équité; et 3) Les enjeux actuels qui freinent l’atteinte de l'équité entre les sexes dans le système sportif québécois comme la légitimité des femmes trans, la culture des organisations sportives, la non prise en compte de l’intersectionnalité et les biais inconscients.

Bien qu’il reste encore beaucoup à faire pour que le monde du sport soit égalitaire et qu’on représente les femmes à leur juste valeur, cette présentation illustrera que les femmes gravitant dans le système sportif québécois demeurent « Invaincues ».

• 13 h 55 : Travailler en musique de création : Une étude de la portée sur la place des compositrices
Conférencière : Ariane Couture (UdeS – Université de Sherbrooke)

Depuis plusieurs années, les valeurs d’équité, de diversité et d’inclusion sont au cœur des discours des organes étatiques municipaux, québécois et canadiens qui soutiennent les arts. Mais l’effet de ces mesures pour la progression des femmes dans le métier de composition de musique savante reste flou. Les compositrices sont découragées à l’entrée de la profession et leurs œuvres ne sont pas pleinement intégrées dans les concerts. Si un certain travail d’insertion a été effectué au cours des dernières années, quelle place occupent maintenant les compositrices dans les programmes des organismes dédiés à la musique de création?

Pour répondre à cette question, une étude de la portée a été réalisée sur le sujet des femmes compositrices et sur leur présence dans le milieu de la création musicale au Québec. De cet inventaire de la littérature ressort trois principaux constats. D’une part, malgré les grandes avancées du mouvement féministe depuis les années 1970, l’égalité des droits et du traitement homme-femme n’est pas atteinte en musique. Il en découle, d’autre part, un certain malaise de parler de féminisme, voire du genre féminin, en musique. Enfin, de nombreuses compositrices adoptent des pratiques musicales alternatives (électroacoustique, improvisation, installation) souvent ignorées par les principaux organismes de production et les grands médias, ce qui crée une double marginalisation en tant que femme ET travailleuse en musique.

• 14 h 20 : La révélation publique de la violence sexuelle : entre luttes historiques et mobilisations 2.0
Conférencière : Sandrine Ricci (UQAM – Université du Québec à Montréal)

La révélation publique de la violence sexuelle sur les réseaux sociomédiatiques constitue aujourd’hui une stratégie de premier plan des victimes pour « briser le silence », selon l’expression consacrée. Pour celleux qui expriment des visées féministes, il s’agit aussi de s’opposer à la culture du viol, impliquant parfois d’exposer les responsables de la production de la violence sexuelle, alors que le système judiciaire et les autres instances concernées faillissent à leur tâche. Pour autant, articuler une analyse féministe, sociologique et historique de ces phénomènes invite à dépasser l’opposition de sens commun entre plainte via des canaux officiels et révélation via des canaux informels. L’objectif de cette communication est de proposer des pistes pour mieux comprendre la révélation publique de la violence sexuelle sur les réseaux sociaux. Entre témoignages sous la bannière #AgressionNonDénoncée et diffusion de listes d’agresseurs, l’angle d’approche privilégié consiste à interroger ces modes d’action pour ce qu’ils donnent à voir, sociologiquement, à commencer par la vulnérabilité structurelle des victimes et leurs capacités individuelles et collectives de reprise de pouvoir. L’exposition des torts subis et des agresseurs impunis pourrait ainsi agir comme révélateur des différents rapports de pouvoir structurant la culture du viol ainsi que de la force sociopolitique d’une analyse féministe des violences sexuelles.

Séance 4 – Famille et conciliation travail-famille

• 15 h 15 : Conciliation emploi-famille, égalité et maternité au Québec
Conférencière : Sophie Mathieu (Institut Vanier de la famille)

La maternité et l’égalité entre les genres sont-elles conciliables? Selon la théorie de l’équité des genres, la faible fécondité serait le résultat d’un écart entre un haut niveau d’égalité dans les institutions publiques comme le marché du travail et un faible niveau d’égalité à l’intérieur de la famille dans le partage du travail de soins. Cette théorie est-elle pertinente pour expliquer les tendances en matière de fécondité au Québec depuis les années 60? Peut-on favoriser à la fois l’égalité entre les genres et la réalisation des intentions de fécondité? Tout à fait. Il suffit de regarder dans le rétroviseur de l’histoire des mesures de soutien aux familles au Québec. En 1988, la mise en place d’une politique familiale nataliste a engendré une montée de la fécondité de courte durée, parce que les femmes ne détenaient pas les outils leur permettant d’être simultanément des mères et des travailleuses. Or, depuis le début des années 2000, le réseau de services de garde et les prestations de paternité ont permis de remettre en question la division du travail, favorisant par la même occasion un climat d’égalité propice à la venue d’enfants. Cette présentation offrira des pistes de réflexion qui font l’objet d’un livre à paraître en 2023 aux PUM sur les liens entre la disponibilité des mesures de soutien aux familles, l’égalité entre les hommes et les femmes et la fécondité.

• 15 h 45 : Évaluation de l’impact d’un dispositif d’aide financière sur le partage du congé parental au sein des familles à faible revenu
Conférencières : Marie Gendron (Conseil de gestion de l’assurance parentale), Safa Ragued (Conseil de gestion de l’assurance parentale)

À partir des données du ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MESS), couplées aux données fiscales de Revenu Québec (RQ), disponibles de 2006 à 2019, une évaluation de l’effet causal de l’attribution d’un montant forfaitaire en plus de la prestation parentale de base sur les décisions de partage du congé entre les deux parents a été effectuée. En utilisant la méthode de la régression par discontinuité (RD) autour du seuil d’éligibilité au dispositif d’aide, les résultats ont révélé tout d’abord que l’attribution de la majoration ne semble pas suffire à modifier les décisions des ménages concernant la durée de congé pris par la mère et le père ni la configuration de partage. De plus, nous observons que lorsque les ménages bénéficient de cette aide financière, la durée du congé parental partageable pris par la mère augmente, alors que celle du congé parental partageable pris par le père diminue. Partant de ces constats, le gouvernement du Québec a modifié les anciennes règles de majoration des prestations destinées aux ménages à faible revenu afin de réduire l’inégalité observée dans la durée de la prise du congé parental partageable. D’autres mesures comme le « Bonus au partage » ont été introduites à cette fin. Les résultats préliminaires de cette dernière mesure montrent que la part du congé parental utilisée par les pères atteint 25 % en 2021, contre 23 % depuis 2014.

Mardi 9 mai 2023

Séance 5 – Marché du travail

• 08 h 30 : Tendances historiques de l’évolution des écarts de rémunération horaire f-h au Québec : bilan selon les grands groupes professionnels et autres perspectives
Conférencier : Luc Cloutier-Villeneuve (ISQ – Institut de la statistique du Québec)

Au cours des 20 dernières années, les femmes au Québec ont connu un essor dans leur participation au marché du travail. En témoigne, l’augmentation de leur taux d’emploi chez les 25-54 ans qui est passé de 74,0 % en 2002 à 85,1 % en 2022. En parallèle, il y a eu certes une réduction de l’écart de rémunération horaire entre les sexes. Toutefois, les résultats sont à géométrie variable lorsqu’on regarde plus attentivement ce qui s’est passé dans les grands groupes professionnels. Cette présentation portera dans un premier temps sur les principales tendances en matière d’évolution des écarts de rémunération horaire entre les femmes et les hommes entre 1998 et 2021 selon les grands groupes professionnels. Trois indicateurs seront privilégiés, la part d’effectifs féminins, la rémunération horaire moyenne et le ratio de rémunération horaire moyenne femmes-hommes. Par la suite, d’autres résultats portant sur l’effet du temps de travail sur les écarts de rémunération seront abordés. Enfin, en guise de perspective, des données sur l’année la plus récente (2022) seront présentées au regard de certaines caractéristiques des travailleuses-eurs ainsi que des emplois.

• 09 h 00 : Persistance des écarts salariaux : une analyse selon la profession et la scolarité
Conférencière : Ruth Rose-Lizée (École des Sciences de la Gestion (ESG) – UQAM )

En 2022, au Québec, l’écart salarial horaire entre les femmes et les hommes était de 10 points de pourcentage et l’écart hebdomadaire de 18,8 points. En 2020, l’écart annuel était de 29,4 points, un meilleur ratio que l’écart de 32,7 points en 2015.

Les écarts hebdomadaires et annuels s’expliquent en partie par le fait que les femmes travaillent moins d’heures par semaine que les hommes et qu’elles s’absentent plus souvent du marché du travail en raison de leurs responsabilités pour le travail domestique et le soin aux enfants ou à d’autres proches. Toutefois, les écarts horaires, stagnants depuis au moins 10 ans, devraient se rétrécir, voire s’inverser, puisque les femmes sont maintenant plus scolarisées que les hommes. Elles ont aussi davantage d’expérience professionnelle qu’autrefois. Les lois sur l’équité salariale et la plus grande sensibilité à l’égard de l’égalité femme-homme devraient aussi contribuer à une réduction plus rapide de ces inégalités.

En plus de faire une recension des écrits sur les raisons expliquant ces écarts, cette présentation examinera de plus près les écarts salariaux femmes-hommes selon la profession et la scolarité, notamment afin d’identifier l’impact de la ségrégation professionnelle. D’autres variables, telles la race, le statut d’immigration, le secteur de travail public-privé ou la taille de l’entreprise, seront aussi analysées.

• 09 h 30 : Penser l’égalité de genre autrement : une solution d’avenir
Conférencièr(e)s : Natalie Rinfret (ENAP – École nationale d’administration publique), Francine Tougas (Université d’Ottawa), Ann Beaton (Université de Moncton)

Les conventions n°100 et 111 de l’Organisation Internationale du Travail, votées en 1951 et 1958, établissaient les principes de l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes pour un travail de valeur égale et l’absence de discrimination en emploi (OIT, 2011). Bien que des lois ont été promulguées et des programmes implantés au Québec et au Canada, la discrimination en emploi n’a pas disparu pour autant.

L’atteinte de ces objectifs doit tenir compte de l’évolution des préjugés au fil du temps tout en portant une attention particulière sur le volet occulte des effets de la discrimination en emploi. Il s’agit de l’émergence des formes subtiles de la discrimination envers les femmes qui oeuvrent dans les milieux non-traditionnels (Tougas et al., 1995, 1998).

Dans cette étude, nous proposons un modèle hybride qui présente des étapes menant vers une véritable inclusion professionnelle des femmes. Les étapes reflètent un processus à moyen et long termes qui conjugue des pratiques d’équité en matière d’emploi prometteuses et un système qui cultive un type de leadership qui propulse vers une culture organisationnelle d’inclusion (Jones & Dovidio, 2018).

• 10 h 00 : Valorisation des métiers du care : quelles solidarités syndicales et sociales? Regard historique et enjeux actuels
Conférencière : Louise Boivin (UQO – Université du Québec en Outaouais)

Dans son avis de 1978, le CSF dénonçait la dévalorisation économique des emplois comportant des analogies avec le travail domestique. Il soulignait l’urgence de désexiser ce dernier en fournissant des services collectifs, pouvant aussi favoriser l’accès des femmes à l’emploi et soutenir les femmes âgées seules, composant la majorité des personnes âgées. Depuis, les métiers du care se sont sans cesse développés au Québec. Toutefois, les ressorts de leur dévalorisation économique et sociale demeurent puissants même si le contexte de pandémie a mis en évidence leur caractère essentiel. La communication posera un regard historique, féministe et intersectionnel sur l’un des ressorts de la dévalorisation de ces métiers: l’inégalité genrée et racisée dans la capacité d’action syndicale, institutionnalisée par les politiques publiques. Ce regard sera actualisé par des références au cas des préposées aux bénéficiaires ou d’aide à domicile du secteur privé. La thèse défendue est que la valorisation économique et sociale des métiers du care bénéficierait d’un syndicalisme inspiré par celui des femmes des classes laborieuses au début du capitalisme et par celui des travailleuses domestiques migrantes d’aujourd’hui. Il s’agit d’un syndicalisme de type communautaire, ancré dans les rapports sociaux du salariat et de la sphère domestique, liant conditions de travail et de vie ainsi que rapport à la citoyenneté sociale et politique.

• 10 h 30 : Oui… et non : Progrès dans la recherche d’égalité et de santé des travailleuses depuis 1973
Conférencières : Karen Messing (UQAM – Université du Québec à Montréal)

Encore aujourd’hui, les femmes gagnent moins que les hommes et sont concentrées vers le bas de la hiérarchie des emplois, malgré un taux supérieur de diplomation. Elles sont plus exposées que leurs collègues masculins aux risques psychosociaux, de harcèlement, et de troubles musculosquelettiques non-traumatiques, et elles sont de plus en plus victimes de violence au travail. Mais la poursuite simultanée de l’égalité et de la santé au travail est complexe, car plusieurs femmes hésitent à identifier des difficultés, de peur que celles-ci soient attribuées à une faiblesse ou une incompétence de leur part. De plus, la recherche scientifique en santé au travail exclut souvent les femmes, leur système de reproduction, leur physiologie, leurs expositions, et l’interface travail/famille, nuisant à la prévention. La récente loi québécoise 27 peut offrir une possibilité réelle d’amélioration de la qualité de vie au travail, mais il faut être vigilantes pour assurer 1) Une possibilité réelle d’intervention auprès des emplois à risque; 2) Une reconnaissance de la pertinence d’inclure l’interface travail/sphère privée dans le domaine de la santé au travail, particulièrement en ce qui concerne les horaires; 3) L’adaptation des outils de travail et d’autres paramètres de l’environnement en fonction de la biologie et du vécu des femmes, enceintes ou non; 4) Un traitement adéquat de la santé et de la sécurité des travailleuses immigrantes et de celles ayant un lien d’emploi non-standard.

Séance 6 – Inégalités économiques et vulnérabilités des femmes

• 13 h 00 : Les inégalités économiques au cœur des familles : les allocations familiales en renfort?
Conférencière : Prisca Benoit (INRS – Institut national de la recherche scientifique)

La famille est souvent perçue comme un lieu d’unité, notamment économique. Deux suppositions soutiennent cette vision : les couples partageraient leurs ressources de façon équitable et le bien-être économique des individus serait le même que celui du ménage. Ces présomptions, partagées par l’État, camouflent le fait que le foyer peut devenir un lieu où les inégalités entre les hommes et les femmes se creusent, avec des conséquences potentiellement désastreuses, notamment en cas de séparation. Nous verrons d’abord que la gestion des revenus, des dépenses et de l’épargne au sein des couples de sexe différent peut maintenir ou accentuer des inégalités économiques qui précèdent l’union, tandis que l’arrivée des enfants peut agir comme accélérateur des iniquités. Nous verrons ensuite que les gouvernements apportent leur grain de sel à la gestion de l’argent des familles avec différentes politiques publiques leur étant destinées, notamment les allocations familiales. Depuis leur création au milieu du 20e siècle, la vaste majorité des allocations canadiennes puis québécoises sont destinées aux mères. Nous verrons comment les allocations familiales, tout en soutenant l’autonomie financière des femmes, peuvent maintenir des normes sociales qui nuisent ultimement au bien-être économique des femmes.

• 13 h 30 : Les rôles changeant des femmes et des hommes au sein de la famille et leurs répercussions sur les inégalités de patrimoine
Conférencière : Maude Pugliese (INRS – Institut national de la recherche scientifique)

Depuis la fondation du Conseil du statut de la femme en 1973, les heures consacrées aux tâches domestiques par les hommes et les femmes convergent. Doit-on conclure que la prise en charge du travail reproductif devient plus égalitaire? La première partie de cette communication fait le point sur cette question, en attirant l’attention notamment sur les normes mouvantes de la parentalité, qui enjoignent à des investissements parentaux de plus en plus intensifs lors de l’adolescence et même la vie adulte. Qui prend en charge l’organisation de ce soutien financier aux jeunes, leur éducation économique? Aussi, la répartition genrée du travail reproductif a des répercussions bien connues sur la situation d’emploi des femmes. Mais qu’en est-il de leur accumulation patrimoniale? Cette question est névralgique dans un contexte de vieillissement de la population et d’érosion des régimes de pension. Pourtant, les écarts de patrimoine entre les hommes et les femmes sont actuellement inconnus, car les sources de données existantes mesurent les actifs et les dettes comme des biens du ménage, assumant par là leur égale distribution au sein des couples. La seconde partie de cette intervention portera sur les résultats inédits d’une enquête réalisée au Québec en 2022 qui offre un tout premier portrait du patrimoine individuel des hommes et des femmes au Québec.

*Veuillez noter que les données présentées aux diapositives 5 à 8 concernent le nombre moyen d’heures par jour et non par semaine.

• 14 h 00 : Un regard sur des situations de vulnérabilité et de résilience pendant la pandémie : quelles inégalités de genre manifestent-elles?
Conférencière : Sandy Torres (Observatoire québécois des inégalités)

Cette communication se penche sur des situations de vulnérabilité et de résilience vécues pendant les deux premières années de pandémie au Québec par des femmes faisant partie des moins nanties sur le plan du revenu.

Les témoignages d'une vingtaine de participantes ont été recueillis à trois reprises lors d'un suivi en entrevue portant sur les obstacles rencontrés et les stratégies d'adaptation face à la crise sanitaire dans plusieurs sphères de la vie (revenu, emploi, santé physique et mentale, réseaux de sociabilité, logement). Le rôle de certains facteurs de vulnérabilité (insuffisance du revenu, précarité d'emploi, isolement, etc.) et de résilience (logement abordable, aide de l'entourage, accès à des ressources, etc.) est mis en relief à partir d'une variété de cas concrets.

La pandémie de COVID-19 représente ainsi une occasion de souligner des inégalités de genre persistantes, certains angles morts, mais aussi des possibilités d'avancées.

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